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Il y a comme un problème...
12 mars 2012

L'impasse Sarkozy face au boulevard Hollande

Nous sommes à 41 jours du premier tour du scrutin et, à en croire les commentaires et les sondages, le sentiment qui prédomine dans l'opinion est révélateur d'un contraste : tandis que Nicolas Sarkozy semble condamné à une impasse, c'est un grand boulevard victorieux qui s'ouvre devant François Hollande. Certes, un fait de campagne aux allures de cataclysme, comme la non-validation de la candidature FN le 16 mars par exemple, pourrait éventuellement rebattre les cartes, mais à l'heure actuelle il est bien difficile d'imaginer le président sortant refaire son retard face au favori des sondages.

Pourtant cette présidence Hollande ne manquera pas de sérieuses faiblesses.

- L'inexpérience de l'homme, certes relative mais bien réelle, à la conduite des affaires de l'Etat ; sa personnalité profonde, dénoncée jusque dans son propre camp et qui en fait un adepte du concensus mou, aux antipodes de ce que l'on est en droit d'attendre d'un chef-décideur, tout particulièrement dans les situations d'extrême tension ; l'absence de charisme d'un homme qui veut tant se donner l'image d'un homme "normal" qu'il laisse donc à penser que le costume présidentiel sera bien trop lourd à porter pour ses épaules.

- Au plan plus politique, le seul fait que son courant n'est même pas majoritaire au sein de son propre parti va énormément peser sur la conduite des affaires, à commencer par la composition de l'équipe gouvernementale et par la distribution des présidences à l'Assemblée nationale ; or on a bien vu lors des primaires combien les positions des uns et des autres pouvaient être différentes, sinon opposées, sur des sujets pourtant majeurs ; au mieux, la gestion des affaires publiques sera donc ralentie, au pire elle sera bloquée, les décisions qui fâchent étant renvoyées sine die.

- Au plan politique toujours, le fait que ce président, inconfortable sur sa base socialiste, aura aussi à ménager les susceptibilités de ses alliés, EELV, Modem ou Front de gauche, de quoi brouiller le cap à suivre et compliquer toujours plus les arbitrages sur les principaux dossiers de son quinquennat.

- Le fait que s'inspirant largement du style et de la stratégie de campagne de son aîné venu des terres de Jarnac, François II rase volontiers "gratis"au cours de cette campagne, en adaptant son discours, et par là il faut entendre ses promesses, à l'audience du moment ; or qui ne se souvient de la gabegie budgétaire post-électorale des années 1981/83, puis de tous ces déçus de la Mitterrandie qui ont provoqué une montée de la tension sociale à l'époque ?  Et la situation économique et financière était loin d'être aussi dramatique qu'aujourd'hui !

Et pourtant, malgré cette accumulation de faiblesses, la sauce Hollandaise prend, bien relayée, il faut en convenir, par une presse qui en profite pour régler ses comptes avec la méthode Sarkozy. Elle prend d'autant mieux que dans le même temps, le président candidat donne l'impression de ne rien maîtriser, pour l'instant du moins, de sa campagne : ni sa communication brouillonne, ni son tempo, imposé par les évènements plus que plannifié suivant une stratégie de montée en puissance, ni ses premiers sujets-flop. L'impression demeure qu'il part au combat un peu malgré lui, comme si cette campagne s'imposait à lui par devoir et non par envie. Celui qui, jadis, "y pensait en se regardant dans la glace tous les matins"  voulait-il vraiment doubler la mise en 2012 ? Comment peut-il être autant empêtré dans la nasse, alors que sa position lui donnait au contraire toute lattitude d'anticiper les manoeuvres de l'opposition et de mener ainsi le combat en tête ?

J'avoue m'être demandé si, dès sa victoire de 2007, M. Sarkozy, en son for intérieur, n'avait pas sérieusement envisagé de passer la main à DSK à l'horizon 2012, avant que l'histoire Nafissatou Diallo et les autres rebondissements liés à sa vie privée n'aient contraint le président du FMI à se mettre en retrait de la vie politique française. Sinon pourquoi lui offrir un poste prestigieux à Washington, lequel le plaçait idéalement sur une trajectoire présidentielle ? Pour priver l'opposition socialiste de l'expertise d'un économiste ? Ca ne tient pas la route. Pour éliminer un opposant ?  En politique, moins vous parlez et moins vous créez de mécontentements : regardez l'extraordinaire cote de popularité de Fillon-en-mode-silence entre 2007 et 2009, ou celle de Chirac-post 2007 ; idem pour DSK version 2008/2011. Pour créer un "adversaire incontournable" qu'il aurait été ensuite facile de torpiller en se servant de "dossiers compromettants" en rapport à une vie privée "débridée" ? Là encore, l'hypothèse de travail ne tient pas la route : les français n'ont pas la même approche puritaine que les américains ; au contraire,il est "bon" pour un présidentiable d'être un "mâle viril", sexe, puissance et pouvoir faisant bon ménage dans notre imaginaire collectif du chef ; et de fait, l'utilisation de "fuites" aurait surtout discrédité les porte-flingues du président et donc le "candidat sortant" (sic). 

Et si "Sarko" avait dû remettre le "bleu de chauffe", contraint et forcé, parce que le costume présidentiel qu'il a fini par endosser dans la droite lignée de ses prédécesseurs, l'enjoint de ne pas laisser le siège à un adversaire qui "ne ferait pas le poids" face à la charge qui l'attend ?

Alors oui, son meeting de Villepinte a rassemblé du monde, mais n'est-ce pas la moindre des choses pour un président en exercice ?!  Alors oui, il semble retrouver ses repères de bête politique qui a fait son succès par le passé. Mais 41 jours plus deux semaines bonus pour inverser une tendance négative, n'est-ce pas déjà trop tard ?!

- Nicolas Sarkozy n'a pas capitalisé sur son mea culpa de début de campagne. D'habitude, les français pardonnent facilement dès lors que l'élu reconnaît ses torts et ses erreurs. Pas ici : soit la sincérité affichée n'a pas convaincu, soit le divorce avec l'homme qui a fait rêver en 2007 est consommé.

- Nicolas Sarkozy n'arrive pas à capitaliser les points forts de son bilan ; il laisse le champ libre à ses adversaires pour noircir le tableau à l'envie. Celui qui, en 2007, voulait être jugé sur ses résultats, s'est laissé mettre en porte-à-faux à son extrême-droite comme au centre et à sa gauche. Il se serait pas autant détesté si sa présidence avait été inutile pour le pays, si les lignes n'avaient pas été bougées sous son impulsion ; alors pourquoi faire comme si le candidat 2012 n'avait pas un vécu présidentiel honorable à défaut d'être parfait ?! 

- Nicolas Sarkozy n'arrive pas à être crédible sur un projet qui semble se construire au jour le jour alors qu'il devrait nous apparaître complet, exhaustif, adapté à la situation présente et surtout cohérent avec ce qui a déjà été entrepris depuis 2007. Il manque une ligne directrice clairement visible, une continuité qui ne serait pas désavouée par des décisions antérieures ou des non-mesures déjà promises mais jamais appliquées.

- Nicolas Sarkozy semble bien seul : la machine UMP est devenue une machine à perdre après 2007 et les triangulaires UMP-PS-FN des législatives à venir va confirmer cette tendance : après les municipales, les cantonnales, les régionales et les sénatoriales, l'UMP va connaître un nouveau revers en juin prochain, voire une déroute. Alors dans le navire amiral, on pense d'abord à sauver ses propres meubles et à se positionner pour 2017. Après tout, si la crise perdure, la présidence Hollande ne fera qu'un petit tour et le balancier politique reviendra à droite et aux quadras/quinquas ambitieux qui se rêvent déjà tout en haut de l'affiche.

 

La candidature Sarkozy est bien dans une impasse. Mais l'homme a de la ressource, de la fierté, de l'orgueil. Et puis surtout il est toujours le capitaine du navire France, et le réflexe électoral qui veut qu'on ne change pas de capitaine dans la tempête peut jouer à plein, si ces prochaines semaines, un violent coup de tabac s'abat sur le pays. Qui sait alors si celui-qui-a-déjà-fait ses-preuves  dans l'adversité, en 2008 et 2011, ne coupera pas le fil au poteau devant son "favori de challenger", à l'évidence bien trop tendre ou insuffisamment préparé pour la guerre internationale, qu'elle soit financière, économique ou militaire.  

 

   

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