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Il y a comme un problème...
11 novembre 2011

De la représentativité de la classe politique

Arrivé bon troisième de la primaire socialiste, Arnaud de Montebourg poursuit son activité de trublion pour faire bouger les lignes dans son propre camp et ainsi imposer sa marque sur ses deux ex-rivaux, François Hollande, en tant que candidat désigné, et Martine Aubry, en tant que première secrétaire du parti.

Sa nouvelle flèche – une limite d'âge imposée pour l'investiture socialiste aux législatives de 2012 – met en effet le parti et le candidat dans une posture piège, compliquée à négocier. En faisant de la jeunesse sa cible prioritaire au niveau de son programme, le candidat Hollande ne peut s'inscrire en faux contre cette proposition qui rappelle son propre contrat générationnel liant l'embauche d'un junior avec le maintien d'un senior pour la transmission d'un savoir-faire dans
les entreprises. Pour Martine Aubry, c'est un sacré défi que de mettre en conformité une philosophie portée par un programme adopté à l'unanimité de ses membres avec les actes des élus, candidats à leur réélection au sein même du parti qu'elle dirige : quel électeur pourrait comprendre et accepter que ceux-là mêmes qui luttent "pour la jeunesse et pour la retraite à 60 ans" n'entendent pas passer pas la main à ... 67 ans quand cela les concerne personnellement.

L'initiative de M. Montebourg a l'avantage de poser le doigt sur l'un des problèmes les plus importants de la représentation
élective dans nos régimes dit démocratiques. On passera sur les exemples (ou les tentatives) de népotisme où un élu en place fait le forcing pour imposer un membre de sa famille à un poste électif en prélude à son futur remplacement par ce dernier. Le fait est que le jeu électoral, fagocyté par les systèmes partisans, ne permet pas un renouvellement suffisant de la classe politique et que, ce faisant, le système de représentation a une forte tendance à se scléroser de lui-même. A l'occasion de la crise financière et économique qui frappe la zone Euro et la France par contrecoup, il est aisé de s'apercevoir que très nombreux sont ceux qui, siégeant à droite comme à gauche de l'hémicycle, élu au Sénat comme à l'Assemblée nationale, portent une certaine responsabilité, individuelle ou collective, dans la mauvaise gestion récurrente des finances publiques et dans l'accroissement inconsidéré de la dette nationale depuis des décennies. Parce que ceux-là mêmes qui, aujourd'hui, nous
promettent d'adopter une rigueur comptable et les autres qui, dans l'opposition, leur font la leçon, drapés dans la toge de la gestion vertueuse, ont été les premiers à laisser courir les déficits, à voter des budgets qu'ils savaient déséquilibrés du seul fait de prévisions de croissance trop optimistes. La démocratie représentative n'a de sens que si le personnel politique est
réellement à l'image des citoyens, en terme de représentativité générationnelle et sociale, en terme de pratique cultuelle ou d'origine culturelle notamment.... Or que peut-on voir en réalité du cette représentativité ? Le Sénat affiche une moyenne
d'âge quasi-canonique, avec des membres que le suffrage universel direct a fini par rejeter mais qui, pour service rendu au
parti ou à une clientèle locale, peuvent encore profiter des ors de la République grâce au système de vote des grands électeurs. C'est là-bas que finissent généralement les ex-députés éjectés de leur circonscription ou les ex-ministres en rupture avec la
soutien populaire. L'Assemblée nationale fourmille de ces députés qui trustent les mandats successifs mais qui n'ont pour ainsi dire jamais été à l'initiative d'une seule communication ou projet d'amendement. Quand la politique devient un métier, voire un fonds de commerce, l'idée démocratique est nécessairement malmenée. On le voit encore mieux à petite échelle, en Polynésie
française par exemple, où les élus de liste ne représentent finalement qu'eux-mêmes et leurs propres intérêts puisqu'ils ne se sentent en aucun cas liés à leurs électeurs, ce qui explique leur propension à voler aussi aisément d'une majorité à l'autre sur la
simple promesse de l'obtention de meilleures prébendes.

L'initiative de M. Montebourg participe à renouveler la classe politique en la rajeunissant par la non-sélection des seniors. Elle
mériterait d'être complétée par une disposition dans la loi électorale qui limiterait le nombre de mandat pour un même poste électif à deux (ou trois) mandatures successives. Pour un député, 10 à 15 ans d'une vie politique devrait amplement suffire à
porter des projets et à travailler pour le bien public ; un maximum de 12 à 18 ans pour un sénateur est plus que raisonnable. Cette initiative
 mériterait aussi d'être relayée par cet éternel serpent de mer que l'on nomme non-cumul des mandats, histoire que chacun à sa place mette toute son énergie à l'accomplissement de son mandat unique, au lieu de jongler avec les casquettes locales, régionales et nationales. La concentration des pouvoirs n'est pas compatible avec l'esprit démocratique.

A l'évidence, la politique est devenue l'affaire d'un petit groupe d'hommes (beaucoup car le milieu reste profondément machiste) et de femmes (un peu) qui se cooptent et qui, de fait, entravent l'entrée en lice d'autres acteurs potentiels et privent le citoyen du choix de ses représentants. Le quadra Montebourg profite de son atout principal – son âge -  pour surfer sur le jeunisme en politique. C'est son intérêt ; pour autant cela ne signifie pas qu'il a tort. Sera-t-il suivi dans son initiative par ses aînés qui ont là l'occasion de démontrer par des actes que leurs discours ont une vraie base idéologique et qu'ils ne constituent pas uniquement un attrape-gogo à destination d'un électorat naïf.    

 

 

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