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Il y a comme un problème...
23 avril 2012

La droite programmée pour la dérive

Au sortir de ce premier tour, il est possible de tirer plusieurs enseignements du scrutin.

Mathématiquement, ce qu'il est convenu d'appeler "la droite" est majoritaire en France ; selon une pure logique arithmétique, Nicolas Sarkozy devrait donc être réélu avec 55% des voix le 6 mai prochain. Dans les faits, au plan purement politique, c'est la gauche qui va tirer les marrons du feu ; politiquement parlant, c'est François Hollande qui va emporter la mise. Cela tient certes à la personnalité contrastée du président sortant, ainsi qu'à son bilan mitigé ; cela tient surtout à cet héritage politique laissé par le stratège François Mitterrand, un héritage qui n'en finit pas de pourrir la vie de la droite républicaine. Dès le revirement de 1983 et l'enterrement du programme commun avec le parti communiste, le président sait bien que ses heures à l'Elysée sont comptées ; sa seule planche de salut consiste à affaiblir la droite. C'est donc le président socialiste qui a oeuvré en sous main pour faire émerger le Front national, bien plus que le seul charisme de Jean-Marie Le Pen ; c'est aussi le même homme qui a soufflé le concept de "diabolisation" largement médiatisé par l'intelligentsia de gauche (pléonasme) et les milieux bien pensants du centre et de droite. En l'espace de quelques années, Mitterrand s'est non seulement offert les conditions d'un nouveau mandat (1988), mais il a piégé pour plus de vingt ans une droite républicaine contrainte par les discours de la gauche à ne pas rechercher une alliance électorale pourtant naturelle. Cette situation constitue une performance encore plus extraordinaire quand on se rend compte que le PS n'a jamais eu aucune honte à frayer avec l'extrémisme de gauche ou un parti communiste aux ordres de Moscou, tout aussi peu fréquentables à la vérité. Deux poids, deux mesures pour considérer l'extrémisme, selon qu'il est de droite ou de gauche, voilà donc une démocratie qui interroge puisque, dans cette France ancrée traditionnellement à droite, c'est un président de gauche qui sera élu dans quinze jours.

L'homme normal qui va entrer à l'Elysée est une erreur de casting dont le seul mérite - mais il est d'importance - est d'avoir su être au bon endroit au bon moment. Voici un homme dont la caractéristique première est de savoir éviter les coups. Il sait être vainqueur aux points, à défaut d'être gagnant aux poings. C'est cette caractéristique de fuir les conflits en permanence ou de toujours aquiescer sans donner suite qui lui a permis de naviguer dans les eaux nauséabondes d'un parti socialiste en déliquescence au sortir des années Jospin. C'est cet art consommé de l'esquive qui  lui a permis de sortir vainqueur d'une primaire socialiste en incarnant le ventre mou à géométrie variable du principal parti de gauche. C'est ce même artifice qui lui permettra de tenir un round durant le seul face-à-face télévisuel, le seul débat offert à une population en demande de duel. Lors de cette soirée, "Sarkozy le puncheur" n'aura pas assez d'allonge pour toucher le vire-voltant favori médiatique tournant tout autour du ring médiatique.

Pour l'emporter le 6 mai, le président sortant devrait s'essayer au grand écart pour parler à la "droite de sa droite" tout en rassurant les électeurs du centre. Cette hypothèse de travail est impossible à mettre en oeuvre avec succès. La droite va non seulement perdre cette élection et elle sera tout aussi logiquement en déroute pour les législatives à suivre puisque le Front national devrait être présent au second tour dans nombre de circonscriptions pour des triangulaires suicidaires pour la droite. Pourtant, la logique voudrait que les électeurs qui se sentent plutôt en phase avec les valeurs républicaines et chrétiennes ne fassent pas le jeu d'une gauche qui annonce le mariage des homosexuels, la régularisation des clandestins et le vote des étrangers aux élections locales (et pourquoi pas nationales ?!). Comment les tenants d'une république forte et nationale pourraient-ils faire le jeu d'une société devenue libertaire ? De la même façon que la droite n'est pas revenue sur la question de l'application de la peine de mort (voire des 35 heures), aucune des réformes sociétales de la mandature Hollande ne pourra être révisée dans les années futures. En France, on ne revient pas en arrière dès lors que l'on parle d'avantages acquis. Tout ce qui sera tricoté par ce pouvoir tout à gauche durant les cinq prochaines années servira donc de camisole définitive à la nation. Or ces réformes sociétales sont bien les seules que François Hollande pourra effectivement mettre en oeuvre puisqu'elles sont indolores pour le budget de l'Etat, et que dans le même temps la gauche ne sera pas en mesure d'accomplir des miracles au plan économique et financier.

Avec la totalité des pouvoirs dans les mains (grandes communes, régions, Sénat et bientôt Assemblée nationale), quelle excuse pourra donc brandir le PS pour expliquer son inefficence à engranger des résultats positifs à l'horzon 2016/2017 ? Ne cherchez pas ! Si les socialistes échouent, ce sera la faute des non-socialistes européens, Angela Merckel en tête. Or cette stratégie politique ne manquera pas d'avoir des conséquences pour la construction européenne au moment où celle-ci est fragilisée par une crise bien plus grave que celle de la monnaie unique ou de la récession. Partout dans l'espace de Schengen, les droites pures et dures montent en représentativité. Il serait illusoire autant que stupide de penser que l'explication tient dans la seule crise économique et financière. Car ce phénomène témoigne d'abord d'une crise sociétale, d'un crise de civilisation. L'immigration n'est certes pas la mère de tous les maux des sociétés européennes, mais elle constitue le phénomène visible d'une aculturation progressive et rampante que de plus en plus de personnes jugent inacceptable autant que dangereuse. Les modèles d'intégration ne fonctionnent plus dès lors que des populations immigrées ne souhaitent pas s'intégrer, dès lors qu'elle entendent importer avec elles leur mode de pensée, dès lors qu'elles en viennent à être majoritaires dans des quartiers entiers. A ce stade, il n'y a plus enrichissement commun, il y a surtout un communautarisme qui affaiblit. C'est symptomatique de cette Europe de Schengen, incapable de protéger ses droits et d'imposer ses devoirs avec ses frontières périphériques perméables, pour les produits comme pour les personnes.Les incantations à la diabolisation immédiatement entonnées par le PS, le Front de gauche, EELV, LO et NPA, voire le Modem, ne régleront jamais la question de fond qui fait que 20% de la société française se reconnaissent peu ou prou dans le discours de Marine Le Pen. La France a peur, la nation a du mal à se reconnaître et tourner le dos à cette réalité finira tôt ou tard par lever une vague brune, surtout si l'Etat se montre faible ou de trop bonne composition face aux menaces, ce qui est une certitude avec la présidence Hollande.

Le problème ? C'est que la méthode Sarkozy et son discours de l'entre-deux tours ne sauront inverser la tendance. A moins qu'il trouve les mots vrais... Autant dire que ce n'est pas gagné 

 

 

 

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