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Il y a comme un problème...
26 février 2012

Referendum, une tendance politique au goût du jour

Amis lecteurs,

Me voici de retour après une longue période d'abstinence bloggeuse due à une surcharge de travail sans rapport avec ce site. Il faut dire que l'actualité est abondante grâce à cette campagne présidentielle qui s'est enfin mise en place depuis la candidature officielle de Nicolas Sarkozy à sa réélection. Les acteurs principaux du casting sont identifiés, place au show, place à la démagogie, place au génie des communicants de tous bords pour créer le buzz, alimenter les polémiques stériles, créer de faux débats pour mieux occulter ceux qui se posent à notre société et à son devenir à l'horizon 2020.

Le sprint vient d'être lancé et de quoi s'aperçoit-on d'emblée ? Que dans le monde merveilleux de nos leaders-ès-politique, ceux-là même qui veulent aller "seul à la rencontre du peuple", selon l'impression consacrée (et largement galvaudée), le citoyen-électeur semble être devenu l'outil de la démocratie, cet être omniscient capable de trancher des questions fondamentales qui se posent à la société par un simple "oui" ou "non". Qu'on se le dise, le temps est venu, dans le pays des bisounours, de mettre plus de participation citoyenne dans notre fonctionnement démocratique. Le futur président et son gouvernement consulteront donc par voie référendaire pour savoir le qui, le comment ou le quoi, parce que, c'est bien connu, le peuple est sage, le peuple est roi.

Il faudrait donc aller en parallèle au bout de cette logique qui redistribue les cartes de la politique nationale : pour compenser les frais occasionnés par chaque referendum tout au long du quinquénat, il conviendrait de faire des économies, et donc de réduire le nombre des représentants élus, au plan local en arrêtant les gabegies engendrées par la juxtaposition des conseils généraux et régionaux, au plan national en sabrant largement dans les effectifs de ces nobles assemblées que sont le Palais Bourbon et le Palais du Luxembourg. Le chiffre donné par le candidat Bayrou - autour de 400 députés - semble raisonnable, surtout si, comme il le préconise, le mandat de député devient "exclusif". Quant au nombre de sénateurs, il serait logique compte tenu de la montée en puissance des conseils régionaux, capables de négocier pied à pied avec l'Etat, qu'il y en ait deux sénateurs par entité départementale, soit environ 200 élus du suffrage indirect. Rien ne justifie en effet l'augmentation de 480 à 577 députés depuis l'abandon du scrutin proportionnel institué en 1986. Quant aux sénateurs, ils appartiennent souvent à cette frange de la classe politique qui se voit octroyée par les partis une rente de privilèges pour service(s) rendu(s), étant entendu qu'ils seraient incapables d'être élus par le suffrage direct de leurs concitoyens. Combien d'ex-candidats à la députation, battus dans les urnes populaires, se sont trouvés "repêchés" par le système des grands électeurs ? Et puisque "c'est vous qui décidez" comme dit M. Carrefour, allons jusqu'au bout de la logique et supprimons la moitié des postes ministériels, puisque, chacun le sait, ce sont les administrations encadrées par leurs hauts fonctionnaires qui mettent les décisions en musique, après avoir préparé les partitions et les instruments.

Donc la tendance actuelle est de redonner la parole au peuple de France. Pour tous les sujets d'importance. Une fois les économies sur la représentation élective et ministérielle effectuées, pourquoi pas ? L'idée ne semble pas mauvaise en soi, sauf qu'un référendum, c'est résumer un débat souvent complexe à une simple question qui peut de facto englober tout et son contraire ; sauf que se prononcer sur une question sans un vrai débat préalable et sans donner aux citoyens une information objective sur les données et les enjeux, cela revient à jouer à la roulette russe. Le peuple n'a pas la science infuse et le peu de bon sens "paysan" qui prévalait dans ses gènes s'est largement dissous dans la société de consommation et son comportement zapping. Alors, l'option référendaire dans une société dominée par le marketing politique et les professionnels de la communication, cela fait au mieux gadget électoral, au pire cela démontre une absence de prise de responsabilités sur les enjeux majeurs. "Je ne sais pas, alors pourquoi pas demander aux autres d'endosser la mesure ou la non-mesure;  ainsi mon bilan sera mauvais tout autant, mais ce ne sera pas ma faute". Est-cela qu'il faut lire dans l'esprit de ceux qui prétendent nous gouverner ? Cette "référendite", ou inflammation du referendum, ne cache-t-elle pas en fait une dissolution de la capacité du politique à gouverner ?

Soyons clairs : l'échéance présidentielle, ramenée par Jacques Chirac à 5 ans de mandature, soit 4 ans de présidence effective comprise entre les six premiers mois de l'installation et les six derniers mois de pré-campagne, ne constitue-t-elle pas le seul referendum exemplaire dans notre fonctionnement démocratique. Un homme (une femme), une vision pour le pays, un projet de société et un programme qui se décline en mesures / projets de loi-phare, cela ne suffit-il pas pour que le peuple indique clairement le chemin qu'il veut voir emprunter pour les cinq années à venir ? Que chaque candidat dise précisément où il veut amener le pays à l'échéance de son mandat et comment il compte procéder, et chaque électeur pourra se décider bien mieux qu'en répondant à une question référendaire potentiellement ambigüe. Le scrutin présidentiel est un referendum pour un programme, quand un referendum présidentiel est d'abord un plebiscite pour ou contre celui qui pose la question.

Et si referendum il doit y avoir, qu'il intervienne pour éclairer nos gouvernants sur le sentiment populaire sur une question qui n'était pas d'actualité lors de l'élection, ce qui a été le cas concernant la gestion de la crise financière de 2008 ou de la crise de la zone euro de 2011/12. Je n'ai pas souvenir de l'organisation d'un referendum à ce moment-là, si?

M. Bayrou a beau jeu de vouloir limiter le nombre d'élus et le cumul des mandats. Il n'a pas aujourd'hui la pression d'élus de son propre camp qui souhaitent se faire réélire puisque son parti, le Modem, est exsangue. Mais plutôt que de proposer la tenu d'un referendum sur ce sujet au moment des législatives ( donc trop tard pour la mise en place de la mesure au cours de sa mandature !!) il n'a qu'à inscrire ce point sur son programme. S'il est élu, il aura la légitimité populaire pour imposer sa mesure aux "élites poiticiennes".

Et c'est là la clé d'une mandature réussie en réalité. Le président élu bénéficie par définition d'une légitimité populaire qui lui permet en théorie de passer outre tous les obstacles insitutionnels pour mettre en place ses réformes, pour autant que les dites réformes aient été inscrites dans le programme du candidat. Quel syndicat socio-professionnel (avec une représentativité quasi nulle dans le secteur privé et sujette à caution dans le secteur public) serait fondé de contester un recul de la retraite à 65 ans, si le candidat devenu président, ayant inscrit cette mesure dans son plan de redressement des comptes publics, proposait une loi dans ce sens à peine élu ?

Ce qui est légitiment contestable, ce sont les mesures prises en contradiction des promesses électorales et des discours-programmes ; ce qui est potentiellement contestable, ce sont les prises de décisions qui modifient le cap ou le but à atteindre en fin de mandature. Si vous avez opté pour une choucroute au menu du quinquénat, il n'est pas acceptable que le cuisinier vous serve une bouillabaisse. Mais l'expérience nous montre qu'à ces moments-là, le cusinier qui gouverne ne demande pas son avis au peuple qui paie l'addition. Si referendum il doit y avoir, il faudrait qu'il soit alors à l'initiative du peuple ou de ses représentants, et non de celui qui est censé gouverner selon un programme prédéfini et majoritairement accepté. Si le recours référendaire doit entrer dans la campagne que ce soit par le biais de son organisation d'initiative populaire.  

Il y a une effet mode de caresser l'électorat dans le sens du poil... démagogique, un peu comme si la présidence demandait un blanc-seing pour gouverner, assorti d'un engagement "moral" de faire appel à l'électorat à chaque question qu'elle jugera importante ou pertinente. Cela augure d'un débat électoral tronqué sur les enjeux de fond, alors que la période est particulièrement critique ; cela augure d'un manque de crédibilité sur les mesures qui seront prises réellement aux lendemains des législatives de juin prochain ; cela augure d'une absence d'idées fortes et de convictions dans une campagne où M. Hollande sera lisse et transparent pour agglomérer le vote des "mécontents du bilan" (sauf que ce n'est pas sur ces bases-là qu'on se crée une légitimité de programme), où M. Sarkozy cherchera à se refaire une virginité populiste pour se défausser d'un bilan impopulaire, où les extrêmes auront beau jeu de monter la sauce et les promesses puisqu'elles disparaîtront rapidement du paysage médiatique et représentatif et où M. Bayrou s'évertuera àa faire entendre sa différence dans l'indifférence d'une presse d'opinion d'obédience (partisanne, maçonnique et autres).   

    

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