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Il y a comme un problème...
2 mai 2016

Référendum : une stupidité pire que les primaires sous couvert de plus grande démocratie participative

La primaire de la droite (sans le centre) entre dans son vrai tour de chauffe avec sa douzaine de candidats à la candidature qui s'expriment un peu partout sur les supports médiatiques. A cette heure, c'est moins le fameux "programme" qu'il convient de prendre en compte ou les postures individuelles - qui malheureusement n'excluent pas les petites remarques personnelles qui se veulent assassines pour discréditer l'autre -  que les méthodes prônées par chacun pour gérer l'après-victoire espérée de 2017. Et là, il y a un vrai problème, car si l'organisation des primaires françaises - un copier-coller hors sol d'un modèle américain inadapté - est déjà une hérésie à l'esprit et à la lettre de la Constitution voulue par le général De Gaulle, le recours au référendum comme méthode de gouvernement constitue un non-sens absolu.

Non que le référendum, prévu et même acté par l'auguste général, ne soit pas ponctuellement un recours nécessaire à la vie démocratique d'une nation. Mais c'est un outil qui, par essence, s'impose pour régler une question surgie ex-nihilo, autrement dit de nulle part, et sur laquelle la majorité représentative en place - gouvernement et parlementaires - ne s'estime pas en droit, légal et/ou moral, de statuer au nom de ses électeurs ou plus largement des français, dans la mesure où elle n'a pas reçu a priori de mandat spécifique sur ce point.

Imaginons par exemple que le Brexit soit acté par les britanniques en juin et que d'autres pays - Pays-Bas, Danemark ou Suède - enclenchent une dynamique identique pour sortir des instances européennes. Il serait alors légitime que le peuple de France soit appelé à s'exprimer sur l'appartenance du pays à ce qui serait une nouvelle Union européenne, régie selon des règles forcément modifiées. Cette situation n'ayant pas pu être anticipée en 2012, et a fortiori débattue lors des dernières campagnes, présidentielle mais aussi européenne, il ne serait pas démocratique dans l'esprit que le gouvernement et le Congrès à sa suite statuent en lieu et place des électeurs, ce qui implique le nécessaire recours au référendum.

Un référendum est une complémentarité à l'exercice du pouvoir démocratique par nos représentants, et à ce titre, il ne saurait être perverti pour devenir une méthode de décision et de gouvernement, sous prétexte d'une volonté - certes louable - de vouloir mieux et plus impliquer le peuple dans la gestion des affaires publiques. Ceux qui planifient de recourir au référendum dans les mois suivants leur élection à la présidence de la République font une grave erreur d'appréciation.

En effet. à peine élus, ils entendent remettre la logique de leur légitimité populaire en question, cette légitimité pourtant obtenue du suffrage universel lors d'une élection qui est la plus représentative de toutes, avec une participation qui flirte souvent les 80% des inscrits, alors qu'un référendum peine souvent à en rameuter 50%. Stupidité.

Dès lors que son programme a été élaboré dans la plus grande transparence, que ses choix stratégiques ont été expliqués et qu'il entend respecter scrupuleusement ses engagements, le président nouvellement élu n'a aucune raison de demander une seconde "autorisation à agir". Ou alors cela reviendrait à considérer le programme électoral, non comme un ensemble de mesures cohérentes, mais comme un menu général dans lequel chaque citoyen serait en droit de venir "piquer" ce qui lui convient pour passer sa commande personnelle. Stupidité !

Imaginons une nouvelle fois ce qui se passerait si, dans ce menu programmatique à la carte, le président soumettait à référendum un dispositif clé de sa stratégie économique et sociale, sa "pierre angulaire, et que les électeurs votent "non", non pas qu'ils se dédisent, mais simplement parce qu'ils ont voté pour ce président pour d'autres mesures que celle-là ! Quid de la logique de gouvernance à venir ? Quid de la logique dans la politique de développement qui serait menée durant les quasi soixante mois qui restent ? Quid de la légitimité de mesures qui seraient prises en conséquence de ce refus, potentiellement opposées au programme électoral initial ? Voter pour une personnalité et son programme, c'est accepter de prendre le tout, le package politico-socio-économique. Sinon rien n'a plus de sens et le pays est définitivement ingouvernable !

Quelle serait la légitimité de ce président, élu en mai, ainsi désavoué en juillet ? Déjà qu'un quinquennat est largement entamé par ces histoires de primaires deux ans avant le terme du mandat et que l'état de grâce dure désormais un petit mois dans les sondages ! 

Cette inflation référendaire, telle qu'elle est préconisée, est la nouvelle posture à la mode qui veut surfer sur le concept de démocratie plus directe. Dans l'esprit, cela se voudrait sans doute une alternative aux grand-messes qui sont organisées avec les organisations syndicales, discréditées et non représentatives, ou avec "les forces vives" de la nation, qui sont autant de comités Théodule et autres think thank d'experts qui n'ont aucune légitimité dans le fonctionnement normal de nos institutions. Sauf que là aussi, celui qui sort vainqueur du suffrage universel n'a en réalité aucun avis à prendre de personne puisque son programme est censé avoir été pensé, pesé, et mis en cohérence avec la situation du pays et la définition des objectifs à atteindre !

Le recours programmé au processus référendaire, à l'heure où une nouvelle mandature s'ouvre, est aussi inutile sur le fond que suicidaire pour la bonne gestion du pays.

Un seul fait pourrait légitimer une telle posture : une élection tronquée de type présidentielle 2002, où le second tour verrait une mobilisation des électeurs de gauche pour soutenir un candidat de droite (ou inversement)  face à la candidate Front National. Là, non seulement il serait démocratique que le président ainsi élu recoure à référendum pour donner une légitimité-acceptabilité à ses mesures politiques phare, puisqu'il n'a pas vraiment une légitimité personnelle d'adhésion, mais alors il serait tout autant logique que son gouvernement soit ouvert à des personnalités de l'opposition, ce que l'on pourrait appeler une mandature de quasi cohabitation dans l'intérêt général. Mais c'est une autre histoire, qui dépend pour beaucoup aussi du score réalisé au premier tour. 

 

 

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Commentaires
G
Ridicule et abscond: ceux de doite veulent ce qu' il souhaitent; ceux de gauche votent pour l' autre dans l' espoir de dezinguér le premier. D'un ridicule absolu!
Répondre
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  • Un regard décalé sur l'information du moment, des analyses originales sur les sujets d'actualité, un point de vue dérangeant qui pose de vraies questions sur notre société et son mode de fonctionnement.
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