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Il y a comme un problème...
14 octobre 2012

Nobel de la paix attribué à l'UE : de l'inutilité d'une polémique à la française

Si l'attribution du prix Nobel de la paix à l'UE m'a en effet surpris, il n'en demeure pas moins que ce choix peut, à la réflexion, parfaitement se justifier. Et puisque je trouve l'argumentaire des "contre" à la fois excessif sur la forme et relativement pauvre sur le fond, je me colle à défendre un point de vue actuellement minoritaire afin de remettre le débat dans une perspective plus "noble".

Voici ce que dit Wikipedia sur la définition voulue par Alfred Nobel : le prix récompense "la personnalité ou la communauté ayant le plus ou le mieux contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou à  la réduction des armées permanentes, à la réunion et à la propagation  des progrès pour la paix".

Le rapprochement des peuples : c'est bien la montée en  puissance politique de l'Europe de l'Ouest qui a été le facteur prédominant au recouvrement pacifique de l'unité territoriale à ce bout de continent en faisant tomber le mur Est-Ouest. C'est bien l'organisation d'un rapprochement des peuples de l'Ouest, par le biais de liens économiques de plus en plus étroits, qui a pu générer cette dynamique conduisant d'abord à la réunification allemande, puis à l'intégration progressive des ex-satellites de l'Union Soviétique. Trouvez donc un autre exemple de "rapprochement des peuples" réalisé à une telle échelle et en moins de 50 années ?! Et pour redescendre à des considérations moins géostratégiques, c'est bien l'idée européenne qui a permis que l'immigré italien, espagnol ou portugais - longtemps victime de ségrégations en France même, jusque dans les années 70 - ne soit plus aujourd'hui considéré comme un étranger.

Suppression ou réduction des armées : c'est bien la construction européenne et son continuel élargissement qui ont permis d'obtenir une réduction substantielle et continue des budgets militaires dans chacun des pays membres. Que l'on considère les chiffres en monnaie relative ou constante, les budgets nationaux alloués aux efforts de défense diminuent chaque année, malgré la multiplication des engagements sur des théâtres extérieurs. Et c'est aussi la montée en puissance de cette Europe communautaire qui a abouti à la réduction quantitative des effectifs militaires : a-t-on si peu de mémoire pour avoir oublié la fin de la conscription en France et la dissolution consécutive de nombreux régiments ? Sans l'UE, cela aurait été impossible, quand bien même la guerre du XXI-ème siècle a techniquement évolué, car l'effet "masse", ou "chair à canon" participe à l'effet de dissuasion. Aujourd'hui l'effet "masse" est constitué par la solidarité de 27 pays.

Progrès pour la paix : au delà de la seule stabilité à l'intérieur de l'Europe avec la résolution de tensions armées souvent séculaires (Balkans..), n'est-ce pas la force morale et politique de l'entité "Europe" qui a permis encore récemment  d'influer, peu ou prou, sur la destinée des printemps arabes ? Et n'est-ce pas a contrario  la faiblesse d'une Europe actuellement en difficulté qui entrave les avancées de son action diplomatique sur les dossiers syrien et iranien notamment, preuve que la stabilité internationale a besoin de l'Union européenne en tant que force politique autonome, face aux "influences" américaines, chinoises, voire russes ; preuve que l'UE joue effectivement un rôle de progrès pour la paix internationale.       

Alors, même si l'UE n'est pas ce monde merveilleux des Bisounours que de nombreux politiciens, de droite comme de gauche, ont voulu vendre aux populations européennes, même si l'UE traverse une nouvelle crise identitaire liée à de multiples causes (politiques, économiques et financières) autant conjoncturelles que structurelles, et même si le tempo n'est sans doute pas le meilleur qui soit compte tenu des tensions sociales et nationalistes nées d'un retour brutal aux réalités de la mondialisation, qui peut raisonnablement prétendre que la construction européenne depuis la réconciliation De Gaulle-Adenauer ne correspond pas strictement à cette définition voulue par Nobel?

C'est trop facile de se plaindre du verre à moitié vide ; c'est trop simple de pointer comme avec délectation les inévitables imperfections inhérentes à cette noble ambition de réunir pacifiquement et de faire vivre ensemble - et pour la première fois de notre longue histoire commune - autant de peuples différents sous une même bannière ; c'est bien trop commode de faire la fine bouche à ceci ou cela en refusant au passage de considérer notre propre responsabilité en tant que citoyen. Mais notre propension à la dérision ou à l'auto-flagellation ne doit pas occulter le fait que l'UE, malgré tous ses défauts et ses nombreux manquements, était légitime à recevoir ce prix, au moins autant que l'ONU (en 2001), l'AIEA (en 2005) ou Barack Obama (en 2009).

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