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Il y a comme un problème...
15 juin 2012

La gouvernance Hollande empêtrée dans ses contradictions internes

Apparemment il va falloir s'y habituer, à ces annonces ministérielles "recadrées" qui renforcent l'idée d'une communication brouillonne et, plus préoccupant, d'une méthode de gouvernement inadaptée à la conduite des affaires d'un pays plongé dans une situation critique.

Vincent Peillon n'a décidément pas de chance avec Jean-Marc Ayrault. On connaît de longue date les nombreux contentieux, personnels et idéologiques qui existent entre les principales figures du PS ; on vient de découvrir, ces derniers jours, ce conflit sentimentalo-politique qui implique le couple présidentiel avec Ségolène Royal. Avec ce nouveau couac Ayrault-Peillon, on peut se poser la question de savoir si le premier ministre entretient de bons rapports avec certains des ministres qu'il a pourtant choisis pour conduire l'action de son gouvernement. Car en moins d'un mois, c'est le seconde fois que le ministre de l'Education se fait recadrer par l'hôte de Matignon. Simple problème de com' ou signe d'une gouvernance déjà malade de ses contradictions internes ? Le débat est lancé.

Cette "affaire" frise d'ailleurs le ridicule : mercredi, Vincent Peillon accorde une interview à un journal local (en parution le lendemain) dans laquelle il indique que les vacances de la Toussaint 2012 seront rallongés de quatre jours, de sorte qu'elles durent deux semaines pleines. Hier, en déplacement électoral en province, JMA corrige le tir en précisant que "rien n'a été décidé", qu'il ne s'agit que d'une "piste" et que cela nécessitera "une large concertation" et une décision collégiale. Sauf que... on peut considérer que ladite concertation a déjà eu lieu puisque, en l'occurrence, cette mesure répond directement aux travaux du Conseil Supérieur de l'Education, faisant eux mêmes l'écho d'une volonté clairement affichée par la Fédération des parents d'élèves (FCPE). Si ce n'est pas une mesure concertée, ça ?! Cela fait plusieurs années que M. Peillon suit les questions de l'Education pour le PS ; cela fait des mois qu'il était pressenti pour occuper ce poste ministériel qui est le sien aujourd'hui. On ne me fera pas croire qu'il n'a pas la connaissance à la fois des dossiers et de leurs acteurs ; on ne me fera pas croire qu'il n'a pas tissé, de longue date, un réseau de correspondants au CSE, au FCPE ou avec tous les syndicats professionnels. S'il y a bien un domaine ministériel où le PS est prêt, c'est celui de l'Education, un bastion corporatiste traditionnellement ancré à gauche de l'échiquier politique. Ce recadrage médiatique était non seulement inutile, mais stupide; mais surtout il est à mon sens révélateur d'un vrai malaise au sein du PS.

Je crois que la gouvernance Hollande va poser un vrai problème à la conduite efficiente des affaires publiques : d'un côté, le président de la République a clairement indiqué qu'il laisserait les rênes à ses ministres afin qu'ils se responsabilisent dans l'action et qu'ils soient ainsi plus efficaces et réactifs ; de l'autre, son premier ministre joue à fond de la posture "concertation élargie aux corps représentatifs", voire au delà, et surtout "décision gouvernementale collégiale". On lâche la bride d'un côté en laissant croire à une autonomie d'action ; on resserre les mors de l'autre au nom de la solidarité gouvernementale. Avec pareille logique, le cheval va finir par se cabrer.

Au delà de la seule question de la pertinence des "concertations" sur laquelle j'ai déjà eu l'occasion d'exprimer mon point de vue, je vois, dans la démarche voulue par M. Ayrault, un besoin impératif de solidariser le gouvernement à toutes les décisions qui seront actées par l'exécutif. Il y a une volonté clairement exprimée d'impliquer toutes les composantes de la majorité au futur bilan "Hollande 2017". C'est donc que le programme Hollande ne serait pas "naturellement partagé" par tous dans ce gouvernement ? A-t-on peur de l'émergence d'une dissidence dès que les mesures fiscales et économiques vont impacter le moral de la nation ? M. Ayrault craint-il que les luttes de pouvoirs, internes au PS, le fragilisent bien plus que l'opposition républicaine ? En voulant impliquer toutes les tendances de son gouvernement pour toutes les décisions, veut-il d'abord se prémunir d'un putsch interne ? A l'évidence, le duo Hollande-Ayrault ne cherche pas à conduire sa politique dans un souci d'efficacité ; il conditionne d'abord son action publique aux contingences de la vie interne de sa majorité de cohabitation. Car la victoire du soldat Hollande et la majorité absolue (prévisible) socialiste à l'Assemblée ne peuvent pas cacher que le PS est devenu une auberge espagnole abritant toute la déclinaison politique, du rose pâle et du rouge vif, et des positions, sur la construction européenne notamment, diamétralement opposées. Et c'est bien parce que le gouvernement est représentatif de cette cohabitation intra-socialiste, ouverte aux alliés qui plus est, qu'il va, dans les faits, freiner l'ardeur réformatrice de ses ministres les plus volontaires ou actifs, et ainsi installer une non-réactivité, voire une inaction au sein de l'exécutif. C'est un vrai problème et certainement un débat qui va s'alimenter dans les semaines à venir...

 

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