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Il y a comme un problème...
22 mai 2012

Quinquennat Hollande, ou la cohabitation permanente

La campagne législative vient de débuter officiellement, et, tout naturellement, le parti socialiste, sorti vainqueur de la présidentielle, se met en ordre de bataille. Son mot d'ordre est somme toute logique : donner à la présidence Hollande une majorité capable d'appliquer le changement promis en mai. C'était la même chose pour l'UMP et Nicolas Sarkozy en 2007, et il en sera toujours ainsi jusqu'à ce que les deux mandatures arrêtent de coïncider. Une autre évidence, tout aussi logique : jamais les électeurs ne prendront le risque de se déjuger à un mois d'intervalle. Pour inverser cette tendance, il faudrait une circonstance exceptionnelle ou une terrible défaillance personnelle apportant la preuve que le projet présidentiel ne répond pas à la réalité conjoncturelle. Comment les citoyens pourraient majoritairement voter pour l'UMP  en juin après avoir rompu avec son leader historique en mai ? Et comment le "changement" incarné par Hollande pourrait survivre à un gouvernement Copé ? Non seulement cette cohabitation ne serait pas acceptable, mais elle n'est surtout pas souhaitable car il est alors vraissemblable que le pays se retrouverait dans une situation de blocage alors que la période est critique au plan intérieur et européen.

L'hypothèse d'une cohabitation est encore moins crédible que dans de nombreuses circonscriptions, le Front national, pardon le Rassemblement Bleu Marine, aura les moyens de se maintenir pour le second tour, ce qui occasionnera des triangulaires suicidaires pour la représentativité de la droite. La question est plutôt de savoir quelle sera l'ampleur de cette victoire annoncée de la gauche. La question corollaire est de savoir si l'UMP pourra se ressourcer dans une opposition parlementaire affaiblie ou si la droite se recomposera autour du FN remanié d'un côté, d'une droite "molle" de l'autre. Par ailleurs, on peut faire le pari qu'aucun candidat du mouvement de Marine Le Pen ne trouvera la clé pour réunir sous son nom une majorité absolue d'électeurs, ce qui privera l'extrême droite de la moindre représentation au palais Bourbon. Cet état de fait politico-électoral quasi-programmé pose en réalité un vrai problème pour le fonctionnement de notre démocratie : comment accepter qu'un parti, fort d'une base électorale tournant autour des 15% au niveau national, avec des pics locaux à 30-35%, ne puisse jouer aucun rôle institutionnel alors que, dans le même temps, un parti comme EELV, ayant fait moins de 2.5% en mai dernier avec sa candidate Eva Joly, disposera vraissemblablement d'un groupe parlementaire à l'Assemblée nationale ? Injecter une dose de représentation proportionnelle dans le scrutin me semble une réforme des plus urgentes à préparer si on ne veut pas qu'en 2017, les évènements n'échappent à tout contrôle.

La cohabitation Hollande - UMP n'aura pas lieu. Cela ne veut pas dire pour autant que le président Hollande ne sera pas soumis pendant son quinquennat à une forme de cohabitation qui ne dit pas son nom. Car c'est une autre évidence que de voir dans le fonctionnement actuel du trio Hollande-Ayrault-Aubry l'augure d'un long fleuve politique très loin d'être tranquille. La victoire du représentant du PS à l'élection présidentielle n'a pas réglé les questions d'ego et les rivalités intestines, loin s'en faut. Martine Aubry a sans doute compris les raisons qui ont poussé François Hollande à choisir son ami et conseiller Jean-Marc Ayrault comme premier ministre ; cela ne signifie pas que ce choix lui a plu et qu'elle l'a définitivement accepté. Au delà de la querelle personnelle, il s'agit d'un vrai différend de ligne politique qui oppose Aubry à Hollande et Ayrault. Et celle qui est condamnée à n'être que la première secrétaire du parti pendant les cinq prochaines années entend bien influer sur les réformes du couple de l'exécutif. Et au sein d'une famille, les guerres d'influence réservent généralement bien des coups bas. Que Jean-Marc se montre incapable de tenir ses troupes, et l'on verra vite Martine jouer des coudes pour essayer de le remplacer. Or, avec des ministres sans expérience gouvernementale, JMA va être sur la sellette.

Le gouvernement Hollande est forcé d'être une alchimie complexe de courants et de personnalités ; mais la combinaison d'aujourd'hui pourrait ne plus correspondre à celle du lendemain. Certains ministres vont sans doute s'émanciper ; d'autres vont probablement changer de courant pour favoriser leur trajectoire personnelle. Mais plus largement imagine-t-on Aubry, Désir et d'autres "non servis" se contenter de disparaître durablement des radars politico-médiatiques sans rien tenter à terme ? Imagine-t-on les grandes "bouches" socialistes, aujourd'hui ministres, se conformer longtemps aux règles de la communication Ayrault et à une ligne sociale qui se révélera vite en dessous de leurs attentes militantes ? Alors, une cohabitation se prépare, mais c'est celle du PS de gauche avec le PS social-démocrate ; c'est celle du socialisme réaliste avec le socialisme utopiste. Et c'est cette cohabitation qui peut poser le plus de problème au pays.       

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